Élections présidentielles 2022 : la vidéo de candidature d'Éric Zemmour.
Éric Zemmour devant un micro lit une lettre. En arrière-plan, on aperçoit une bibliothèque. Puis, au fil de sa lecture, des images curatées montrent le visage d'une France meurtrie : violence, insécurité, précarité sont présentées. Puis Éric Zemmour revient sur le passé de la France qu'il aime tant, une France qu'il qualifie de plus sûre, celle de Jeanne d'Arc, De Gaulle et Napoléon.
Sans surprise, Éric Zemmour conclut sa vidéo en annonçant qu'il sera candidat à la présidentielle :
"Je pensais qu'un homme politique reprendrait le flambeau que je lui avais passé. Je me disais : à chacun son métier, son rôle, son combat. Je suis revenu de cette illusion. Comme vous, je n'ai plus confiance et j'ai décidé de prendre notre destin en main. J'ai compris qu'aucun homme politique n'aura le courage de sauver le pays du destin tragique qui l'attend. "blockquote>Au-delà de la grandeémotion et des polémiques qui vont naître de cette vidéo, le choix de la musique de fond donne à l'ensemble un ton grave, comme une marche funèbre. Que sait-on de ce morceau ?
Zemmour choisit la Symphonie n°7 de Beethoven pour se présenterPour
être
plus précis
, il s'agit de la Symphonie n°7 en la majeur, OP92-2 "Allegretto" de Beethoven. Même si ce morceau du compositeur légendaire n'est pas reconnu aussi instinctivement que sa lettre à Elise, il s'agit de l'une des deux symphonies les plus connues du compositeur allemand.
Ludwig van Beethoven a écrit cette œuvre, composée entre 1811 et 1812, pendant la campagne de Russie de 1812, au cours de laquelle les forces napoléoniennes se sont opposées au Saint Empire romain germanique (1803-1815).
Le deuxième mouvement, appelé Allegretto, a été souligné par le compositeur allemand comme "l'une de mes meilleures œuvres". Il a dessiné les premiers contours de ce deuxième mouvement en 1806, cinq ans avant de s'attaquer à la septième symphonie.
Allegretto semble assez ironique dans ce cas, car si son tempo peut inviter à la danse, il ne correspond pas à la "sérénité" dont parle Allegretto. Et c'est bien intentionnellement qu'Éric Zemmour utilise cette musique pour donner à sa vidéo un ton grave et une ambiance angoissante.
Le morceau est très souvent utilisé dans les films et on peut l'entendre dans les films suivants :
1981 : Les Uns et les Autres de Claude Lelouch2002 : Irréversible de Gaspar Noé2004 : La Marche de l'empereur, documentaire de Luc Jacquet2008 : À bord du Darjeeling Limited de Wes Anderson2010 : Des hommes et des dieux de Xavier Beauvois (dans la bande-annonce)2011 : Le Discours d'un roi de Tom Hooper2014 : Diplomatie de Volker Schlöndorff2014 : Adieu au langage de Jean-Luc Godard2016 : X-Men : Apocalypse de Bryan Singer2016 : L'Origine de la violence d'Élie ChouraquiPourquoicette musique est-elle un mauvais choix de Zemmour ?
Pour faire simple, Beethoven est un contemporain de Napoléon Bonaparte. Au début de sa vie, il l'apprécie. Il l'inspire. Le compositeur s'installe à Vienne, mais rêve de Paris. Il observe avec intérêt le jeune général et ses exploits : la campagne d'Italie en 1796, la campagne d'Egypte en 1798 et son coup d'Etat du 18 Brumaire en 1799.
Beethoven voit en Napoléon une figure du renouveau et surtout un homme démocratique
.Jusqu'à ce que Napoléon, l'homme qui mettait la main sous son gilet, se fasse couronner empereur des Français. C'était bien loin des élans démocratiques que Beethoven lui prêtait. A partir de ce moment, Ludwig van Beethoven développa une certaine aversion pour l'empereur Napoléon Ier.
L'écriture de la Symphonie no 7 s'est donc faite dans ce contexte très anti-napoléonien (et donc très anti-français) de la part du compositeur classique.
Pire encore, la symphonie fut jouée pour la première fois le 8 décembre 1813. À cette occasion, Beethoven a interprété une autre œuvre : la bataille de Wellington (également appelée bataille de Vittoria). Cette pièce célèbre la défaite des troupes napoléoniennes par les troupes commandées par le général britannique Wellington dans le nord de l'Espagne, qui a eu lieu le 21 juin 1813. Dans cette œuvre, 193 coups de canon sont entendus, imitant les coups de canon qui ont conduit à la défaite française.
La 7e symphonie de Beethoven empeste donc pour la France : elle est la bande-son d'une détestation de l'ancienne France saluée par Éric Zemmour, mais elle accompagne aussi ce qui deviendra l'une des défaites amères de l'Empereur.
Pour l'anecdote, on notera que ce morceau a été repris par Johnny Hallyday :